Samedi 6 mai :
Je quitte temporairement mon petit havre de paix à la Ela Guesthouse pour aller à quelques kilomètres plus au sud, au bord de la mer à Kep. Le bus ne peut pas venir me chercher, du coup JP propose de me conduire jusqu’à l’agence en moto. Super ! J’ai maintenant l’habitude : le gros sac à dos… sur le dos, le petit devant moi, et mon sac supplémentaire (acheté à Siem Reap pour y caser les petites choses achetées ici et là qui devenaient compliquées à transporter, mais aussi mon thé, le sucre, des biscuits, des fruits, l’eau… ) à l’avant de la moto. En 5 mn nous y sommes. Le bus part à 11h00. Une grosse ½ heure plus tard nous sommes à Kep. Il n’y a pas réellement de village, ou plutôt il est découpé en 3 parties distinctes en front de mer et distantes de 2 ou 3 km les unes des autres : la plage, là où le bus s’est arrêté, plus au sud, un noyau d’habitations et d’hôtellerie ou guesthouses, et à l’opposé, le marché aux crabes. Kep est la capitale du crabe. Ici on peut l’acheter sous toutes ses formes : petit, gros, cru, cuit, cuisiné, décortiqué… J’ai réservé une guesthouse près du marché, l’estomac a parlé. Je marchande un instant le tarif avec le chauffeur de tuk-tuk qui s’est précipité sur moi avant même que je sois descendue du bus, et me voilà à ma guesthouse. J’ai prévu d’y rester 2 nuits. Accueil sympathique, un cadre agréable, on me montre ma chambre qui me convient parfaitement. En commençant à m’y installer, je suis affreusement dérangée par une odeur persistante d’humidité. Je laisse passer un moment, j’essaie d’ouvrir la fenêtre mais l’odeur est partout. Je demande à changer de chambre. Vu la facilité avec laquelle on m’en propose une autre, aussi bien, à l’étage, mais sans odeur cette fois, j’imagine que je ne suis pas la première à m’en plaindre. Des vélos sont proposés à la location pour 1$ par jour, j’en prends un et, comme à mon habitude, je vais explorer les environs. Pour aujourd’hui je me contente du secteur de la plage. Je n’ai pas pris mon maillot car le temps est très orageux. Des vendeuses sillonnent le front de mer en proposant du crabe cuit. Je me laisse tenter par un sachet : 1 kg de tous petits crabes de la taille de nos étrilles pour 2$. Enfin 1kg c’est ce qui est annoncé ; je suis sure que j’en ai tout au plus 600 ou 700 gr, mais ce n’est pas gênant. Je suis seule et je ne pourrais pas conserver ce que je ne mangerais pas. Je m’installe donc face à la mer, sur un muret et me régale. Quand j’ai terminé, la nuit ne va pas tarder à tomber, et le ciel se fait vraiment très menaçant, je préfère donc rentrer sans tarder. Je m’achète au passage de quoi pouvoir grignoter dans ma chambre plus tard. L’autre spécialité de Kep, et de Kampot aussi c’est le poivre. Le poivre de Kampot est parait-il un des meilleurs du monde et il est vendu extrêmement cher en France. Les plantations de poivres sont pour la plupart entre Kep et Kampot. Je veux donc profiter de ce week-end pour aller en visiter une. Le souci c’est comme toujours que je suis seule et que, partir en tuk-tuk pour 20 km va me coûter un bras. Je demande donc à la guesthouse si à leur connaissance, il n’y aurait pas d’autres clients intéressés, mais comme toujours, il y a très peu de touristes en ce moment et pas de co-tuk-tukeurs éventuels. Je pense donc essayer de trouver demain une moto dop (moto taxi, bien moins chère qu’un tuk-tuk)
Samedi 6 mai :
Dès le petit-déjeuner avalé je me dépêche de partir en vélo. J’ai envie de faire une grande balade d’un bout à l’autre de Kep. Je veux aussi me renseigner pour éventuellement aller passer un journée sur l’île aux lapins : une petite île paradisiaque parait-il, juste en face de Kep, ainsi appelée car elle aurait la forme d’un lapin. Je vais donc d’abord jusqu’à l’embarcadère. Je décide de prendre un ticket pour lundi. Je préfère éviter le dimanche car c’est la destination n° 1 des cambodgiens, et pour apprécier une île quasiment déserte, je préfère éviter les hordes de khmers qui ne sont pas les plus discrets quand ils sont en goguette. Je longe le front de mer, j’observe un pêcheur qui relève son filet.
Puis je vais au marché au crabe, impressionnant.
Un grand marché au poisson en fait. Mais on ne fait pas que le vendre ici, on le cuisine sur place aussi. On peut donc aussi bien s’installer à une table de « restaurant » et passer commande, qu’acheter crabe, poisson, crevettes, poulpes, grillés, en brochette ou en sauce, tout cuisiné.
Mais on peut aussi l’acheter cru et le faire cuisiner sur place.
J’aimerais bien du crabe, encore. Mais cette fois, ils ne sont minuscules comme ceux que j’ai achetés hier, sur lesquels il n’y pas grand-chose à manger, ce sont des beaux spécimens. Et ils ne sont vendus qu’au kilo. Ça fait vraiment trop pour moi seule. Du coup je me rabats sur une magnifique brochette de grosses gambas, grillées et assaisonnées d’ail et de lemongrass. J’achète aussi une sorte de gaufre, cuite sur le feu de bois dans un moule en fonte, et me prépare à m’éloigner un peu du marché pour déguster tout ça. Alors que je suis prête à reprendre mon vélo, un chauffeur de tuk-tuk en train de faire rire la galerie, m’interpelle et me demande où je vais manger. Je lui dis que j’ai mon vélo, il me pose une ou deux questions, on discute, et il me demande ce que j’ai prévu de faire à Kep. Je lui dis donc que j’aurais aimé aller visiter une plantation de poivre mais que c’est trop cher pour moi seule. Evidemment il saute sur l’occasion pour me dire qu’avec lui ça ne coute pas cher du tout. Qu’il peut même m’y emmener immédiatement pour 10$. Je saute sur l’occasion : ok pour 10$ ! il est un peu pris au dépourvu et éclate de rire. Je lui demande si je pourrai manger dans son tuk-tuk ; il est d’accord. Les 2 jeunes femmes avec qui il plaisantait me laissent donc la place dans le tuk-tuk et nous voilà partis. Au bout de 2 ou 3 km, nous croisons un de ses confrères, il l’interpelle, s’arrête, lui dit quelque chose en khmer, et me demande de changer de véhicule : c’est son frère qui m’emmènera à La Plantation. Je m’exécute. Mon nouveau chauffeur parle un peu français, il m’explique qu’il prend des cours à Kep chaque semaine. Tout au long de la route, il m’explique ce que nous voyons. Notamment quand nous quittons la route principale pour les chemins de campagne. Il me montre les plantations de cannes à sucre,
les premières plantations de poivre,
les rizières (il m’explique qu’ici il y a 2 récoltes par an, la première pour le « short rice» dont la culture est plus courte. D’ailleurs, il est déjà prêt à être repiqué. Nous voyons des hommes et des femmes à pied d’œuvre. Le « long rice » viendra ensuite.
(J’ai vainement cherché des explications sur cette histoire de 2 récoltes, avec une culture plus rapide que l’autre, mais je n’ai rien trouvé à ce propos. Je vous retranscris donc ce que mon guide m’a expliqué)
Nous passons aussi devant un grand lac. Il m’explique qu’il s’agit de « Secret Lake », d’abord creusé par les bombes de la guerre du Vietnam, puis creusé à la main, sans aucune aide mécanique ou animale sous Pol Pot… Travaux forcés ! On a du mal à le croire tant il est immense…
Enfin après une longue route à travers la campagne, nous arrivons à « La Plantation ». Une visite commentée par un guide français est proposée. J’y apprends plein de choses, étant totalement ignare au sujet du poivre que j’achète comme tout le monde en supermarché, sans jamais m’être demandé comment il poussait. C’est donc une liane, les grains de poivres en sont les fruits. Il faut 3 ans à la plante pour donner, 3 ans pendant lesquels elle doit absolument être protégée du soleil. D’où d’immenses abris en feuilles de palmiers pour les protéger.
C’est d’ailleurs pourquoi le poivre pousse en forêt à l’état sauvage. Les grains sont en grappe et sont récoltés soit verts (poivre vert, mais qui ne se conserve pas longtemps), soit rouge. Il est alors mis à sécher. Très peu longtemps : il reste rouge, plus longtemps : il devient noir, et s’il est ensuite décortiqué pour ne garder que le cœur, il est blanc. Moi qui n’aime pas le poivre, je dois reconnaître que l’odeur est très agréable, et bien différente du poivre dont j’ai l’habitude. Je goûte le poivre vert à la fleur de sel, et surprise : j’aime ! En fait les baies sont tendres, et peuvent ainsi se grignoter pour l’apéritif par exemple. Evidemment je fais des achats. Je n’ai quasiment rien acheté du tout à ramener pour offrir jusqu’à maintenant, mais là je me lâche un peu. Ça fera ça en plus à trimballer alors que mon sac à dos est plein…
Après cette visite fort instructive, nous revenons à Kep où je retrouve mon vélo qui m’a sagement attendue au marché au crabe.
J’avais prévu mon maillot de bain, et c’est donc à la plage que je vais directement. On est samedi et la promenade le long de la plage est donc occupée par des chaises longues, des hamacs, et des tapis proposés à la location.
Personne n’est sur le sable, sur la plage. Ou seulement quelques touristes occidentaux, dont moi. Les cambodgiens sont installés sur les nattes ou les transats sur le trottoir, ou sur les terrasses abritées avec des hamacs, comme j’ai déjà vu autour des lacs. Et ils se baignent habillés. Certains hommes sont en short/maillot mais ils sont rares.
Je m’installe donc sur le sable, me change et vais directement me baigner. Puis je fais un somme. A mon réveil, une autre femme blanche est installée près de moi. Nous commençons à discuter : Martha est française d’origine colombienne (à son accent je me demandais vraiment d’où elle pouvait être même si elle parle un excellent français). Nous avons le même âge, et ses enfants ont à peu près l’âge des miens. Elle est à Kep pour faire du bénévolat dans une ONG qui promeut des études professionnalisantes. Elle est là pour 3 mois mais a déjà passé 7 mois au Cambodge l’an dernier. Nous passons l’après-midi à discuter et repartons ensemble de la plage à vélo. J’ai prévu d’aller dîner sur le marché, mais elle est attendue là où elle loge. Nous nous donnons rendez-vous sur la plage demain, avec l’idée d’aller ensuite dîner ensemble.
Pour ma part, j’ai décidé de m’offrir un vrai resto ce soir. « La » spécialité ici est évidemment le crabe au poivre vert de Kampot et je veux y goûter. Je ne suis pas déçue. Une tuerie ! Un seul regret : ne pas avoir de pain pour saucer. 7,90$ pour un plat, plus le riz, une bière, une petite boule de glace pour faire glisser, la portion d’ananas est offerte. Je m’en tire pour la somme faramineuse de 11$ ! Une fortune ici ! C’est bien la première fois depuis 3 mois en Asie que je dépense autant pour un repas. Pendant que je déguste mon succulent repas, un orage éclate (j’ai bien fait de choisir un restaurant couvert), des trombes d’eau dégringolent, comme toujours. J’envisage donc de mettre le vélo dans un tuk-tuk pour rentrer, d’autant que ça grimpe pour arriver à la guesthouse. Mais finalement, quand je sors, il fait de nouveau sec. Je peux donc rentrer en pédalant tranquillement. Je prends juste quelques gouttes sur la fin.
(pendant que j’écris, il y a un karaoké plus loin, mes oreilles saignent. C’est affreux ! Faites-le taire !)
En rentrant, je réserve une autre guesthouse pour demain soir et lundi soir, tout près du lieu d’embarquement pour l’île aux lapins puisque j’ai prévu d’y passer la journée lundi.
Dimanche 7 mai :
Mauvaise surprise au réveil : depuis l’orage d’hier, le ciel est resté couvert et il pleut. Quasiment toute la journée. J’ai demandé au chauffeur de tuk-tuk qui m’a conduite à La Plantation hier de venir me chercher pour aller dans ma nouvelle guesthouse. Elle est tenue par des français. Pas de plage, pas de Martha. C’est dommage que je ne sache pas où la trouver, nous aurions pu passer la journée ensemble quand même. Mais j’imagine que, comme moi, elle a renoncé au vélo aujourd’hui. Du coup je passe une partie de la journée à discuter avec les patrons de la Rega Guesthouse. Ce soir ils fêtent l’aboutissement d’un projet commun avec un autre expat. Une jeune française est là aussi, ils ont acheté des pistaches et de la feta pour l’apéritif et nous proposent de nous joindre à eux. Soirée très sympa.
Waouh ton récit m’a transportée et fait rêver…merci ! Belle continuation !
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Merci ! 😉
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-coucou
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